On s’arrête de marcher. À un moment, comme ça, on s’arrête de marcher. On marchait on ne marche plus. On marchait on s’arrête. On regarde autour de soi. On fait le tour. De l’horizon. Du moins celui qu’on a là où on est. On fait le tour, on jette un œil. On regarde. L’endroit convient. Ce ne sont pas tous les endroits qui conviendraient et on en a une connaissance intime et certaine. Même des endroits qu’on ne connaît pas.

On laisse glisser la lanière de son sac. On laisse glisser les affaires à terre. Le gilet, le pull, on pose, on dépose, on arrête tout, on arrête là. C’est à ce moment que les choses commencent vraiment.

On brise la ligne de sa verticalité, on la courbe, on la tord, on la fragmente, on joue sur les possibles des articulations, on connaît les codes, les limites, les souplesses, et la saveur intime du poids du corps sur l’herbe, allongé dans l’herbe, oublieux du monde.

On y est. On a le nez dans l’herbe. Le nez dans les graminées. Dans leurs lignes, leurs effondrements, leurs brisures, leurs segments, leurs arrachements, et le vent qui les ébouriffe et notre souffle aussi qui les caresse et les redresse.

On a le nez au ras du monde. Dans le dédale du monde. Là, à cet endroit précisément, où le monde devient tout autant abstrait que concret, fragile et solide, et tout à la fois, parce que ça n’a pas d’importance. On a retrouvé ce qu’on avait perdu. On a le nez au ras de sa rêverie, le nez au ras de la caresse du monde.

On ne pense à rien d’autre. Pas besoin. On a le nez dans les brins d’herbe et le bonheur d’être.

Texte : Isabelle Pariente-Butterlin

Photos : Louise Imagine

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Isabelle Pariente-Butterlin n’a fait l’immense bonheur de généreusement déposer ses textes, ici, accompagnés de mes images. Notre conversation reprenant alors,  pour ma plus grande joie. Une respiration, mouvante.

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