Komm tanz mit mir Ali
ce mot chuchotement est trop long pour moi – je veux seulement écrire
komm tanz mit mir Ali
c’est quelque part sur une place – un homme danse avec un chariot élévateur – son corps sans voix contre le silence – on peut entendre son souffle on peut entendre sa rage – on peut entendre
je cherche – je cherche ton prénom sous la pluie torrentielle – tu ouvres la porte – un moment ta voix ne ressemble pas à – c’est ton prénom c’est ton prénom dans une rue qui cède à la pluie torrentielle – nous courons et nos corps heurtchoquent les milliers de gouttes – et ton prénom se perd dans des milliers de gouttes – mon épaule frôle ton épaule ta main se glisse dans ma main – et la pluie lie nos corps et nos corps heurtchoquent les milliers de gouttes
la porte se ferme dans ta voix
komm tanz mit mir Ali
tu es la voix – la voix qui parle dans le creux de mon oreille – comme les neutrinos traversent la matière – quelque chose s’échappe du coeur du battement du coeur – tout à coup la chambre rouge est trop petite – la chambre rouge vibre de la danse des voix
buste bras terre– monolithique corps terre jambes reptiles – du geste la lumière sur les attaches fines de ton corps suspendu à la machine
on entend des bruits de voitures des bruits de moteurs des bruits de pas des bruits de – tu parles une langue que je ne connais pas – on parle une langue avec beaucoup de silence – je regarde dans le dictionnaire bleu – on écoute pendant de longues minutes l’écoulement du silence de ton pays de mon pays
face à face corps souffle machine – la machine soulève ton corps tes bras en appui sur les bras de la machine – je vois la poétique de tes mains dans le vide
de loin – on voit le corps léger d’un l’enfant – balancement irrégulier dans le vent – et autour comme un bruit dans l’ombre – ta voix raconte l’histoire de l’étranger ton corps raconte le départ la traversée silencieuse chaque partie de ton corps comme une / la mémoire de cette traversée – rien se dit rien ne se crie – on peut voir par moments dans tes yeux la peur l’étonnement la force l’épuisement
komm tanz mit mir Ali
de loin – on entend l’élan d’une voix l’élancement d’une voix – c’est le chemin le même chemin nul autre chemin – tu marches tu marches dans le soir tu marches dans l’errance attentive – ton corps à coté d’autres corps dans la peur cachée
de près – un mur vieux avec une bande de bleu électrique – cinq corps en appui épaule sur – rien n’arrête rien ne fige le corps
tu es la voix – la voix qui parle dans
komm tanz mit mir Ali
Texte, photo : Ana nb
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Après quelques mois sans vase communiquer, c’est avec grand bonheur que j’accueille ici Ana Nb. Alors, plonger sans réserve dans ses effacements, plonger intensément dans Le jardin sauvage, et sentir ressentir respirer la musique, précieuse, de son écriture.
N’hésitez pas à lire ses belles contributions à la superbe revue D’ici Là.
Merci à Brigitte Célérier, qui regroupe vaillamment et avec tant de patience et de gentillesse l’ensemble des échanges du mois sur son site dédié.
Si le cœur vous en dit, ma participation à ce 2e vase communicant de l’année 2013 est par ici…
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« Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre. » Vases Communicants
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